La rencontre /
Les
fiançailles
/ Le mariage / Le temps des voyages
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L'appel de l'aventure
C’est à
l’occasion
d’un audit dans une des entreprises où il a
travaillé - Schlumberger ou la SAPIT - qu’un
membre de la Gherzi
Textile Organization a dû remarquer un jeune et
brillant
ingénieur nommé Jean Krebs et lui faire une offre
d’emploi. Cette
société, créée en 1929 par
Giuseppe L.
Gherzi (1902-1992), a son siège
à Zurich et pour devise: si ordo deficit virtus
non sufficit.
De 1929 à 1959 elle est spécialisée
dans le
conseil en ingénierie textile; ensuite elle diversifiera ses
secteurs d’intervention géographiques et
techniques.
D’après les séjours
effectués par Jean dans
les années 30, elle envoie des ingénieurs,
seuls ou en
groupe, pour des missions de quelques jours à quelques mois,
principalement en Europe centrale. Une bonne connaissance de
l’allemand, la langue véhiculaire de ces pays,
était utile; plusieurs des collègues de Jean sont
cependant italiens, ce qui correspond à l'origine du
fondateur, né à Novare, fils d'un général. Par un juste retour des
choses,
c’est dans des circonstances analogues que
l’entreprise Vandendriessche
débauchera le jeune ingénieur de
Gherzi.
On devine ce
qui a séduit le couple
dans cette offre: pour Jeanne la perspective de voyages, dans une
existence enfin libérée des contraintes de
l’enseignement, pour Jean la possibilité
d’acquérir une expérience
diversifiée et d’échapper au
confinement dans une
petite usine alsacienne. Bien plus tard, après une mise
à
la retraite mal vécue, il inscrira sur ses cartes
professionnelles: consultant, renouant ainsi
symboliquement - à travers son activité
à l’usine de Viesly
-
avec la spécialisation de ses débuts.
On est particulièrement bien
renseigné sur cette période, grâce aux
nombreuses
cartes postales envoyées ou reçues et qui ont
été conservées,
complétées par les
photographies de l'album 1935-37; grâce aussi à un
cahier d’écolier des Mines Domaniales de Potasse
dans
lequel Jeanne a noté quelques impressions de voyage en 1936-37. Elle
ne se livre certes pas davantage que dans son journal interrompu, mais
le fait même de noter les choses vues indique une
disponibilité d’esprit, une
légèreté
qu’elle ne retrouvera plus. Pour elle, en effet, cette
série de voyages a été
vécue comme des
grandes vacances, une libération
après la
contrainte
d’un métier ingrat. Ce fut
rétrospectivement, de
son propre aveu, la période la plus heureuse de sa vie,
malgré quelques accès d’une
légère
mélancolie inhérente à sa nature.
C’est la
confidence d’une jeune mariée pour qui ces
années
nomades sont une sorte de prolongation du voyage de noces en compagnie
d’un mari encore présent en-dehors de ses heures
de
travail. Plus tard ce même mari sera de plus en plus
accaparé par ses responsabilités professionnelles
et une
vie sociale intense qu’elle ne partageait
qu’à la
marge, alors qu’elle-même n’avait que peu
d’autonomie.
Le contrat
avec Gherzi prend effet au 1er octobre 1936
et durera jusqu'au 31 décembre 1938. Sur le carnet de
cotisations à la
caisse de retraite le dernier employeur, la SAPIT, a apposé
son
cachet jusqu’en septembre 1936;
ensuite il n’y aura
plus
que des «cotisations volontaires». Le 16 septembre 1936
Jean demande à la Préfecture l'autorisation de "revenir
habiter Mulhouse", au 19 rue de l'Espérance qui sera le port
d'attache du jeune couple lors des années vagabondes qui
s'annoncent. Pourtant, la
première mission commence
dèjà début mai
et dure juqu'à à la mi-août de cette
année 1936.
Etait-ce un contrat
d’essai en accord avec l’employeur alsacien?