Les
Obrecht / Les Hild / Les
Schmitt / Les Obrecht-Schmitt
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On n'oublie pas le village
La région de
Colmar-Andolsheim-Horbourg
reste un pôle d’attraction pour la famille. On se
sent
concerné par le décès de parents plus
ou moins
lointains, par les événements qui s’y
déroulent: ainsi l’incendie qui détruit
plusieurs
maisons d’Andolsheim en juin 1915. A chacune de ses
permissions Alfred prend le train avec son épouse et sa
fillette pour rejoindre les parents Schmitt
à Horbourg. C’est pour Alfred l’occasion
de voir ses
parents, pour Jeanne de retrouver une certaine autonomie par rapport
aux siens, pour les deux d’échapper au
rationnement en
vigueur en ville, d’autant que l’auberge Schmitt devait
offrir un
séjour plus confortable que la modeste maison des Obrecht à Mulhouse.
Les permissions se passent presque
entièrement loin de cette ville. Le billet de train
de Mulhouse à Colmar coûte
2,10 Marks, et moitié prix pour la fillette.
Jean Obrecht
reste particulièrement attaché à son
village natal, même s'il
n'a plus
de parenté directe sur place après la mort de son
père (1911) et la vente probable de la demeure
familiale d'Andolsheim. En 1917 il fait allusion à la vente
d'une parcelle de forêt et du "grand champ de l'Ill". Il
profite
régulièrement
des vacances scolaires pour renouer avec ses origines. Il loge alors
à
Colmar chez
ses beaux-parents, les Hild, ou chez une «cousine
Zitzer» à Andolsheim même, à
qui il paye
pension (5
Marks par jour en septembre 1917). Il s'agit de la
couturière Madeleine Zitzer, née Marschalk, fille
de son
oncle maternel, le cordonnier André Marschalk. Quant au
jeune ménage
Schmitt, il semble qu’il ait gardé un
pied-à-terre
à Colmar comme locataire ou propriétaire. Il est
fait
allusion, en avril 1918, à un logement au 2 Avenue de
Fribourg
(remplacé aujourd’hui par un immeuble moderne).
Après le décès d’Alfred ce
logement est
abandonné en août 1918; le
déménagement (160
Marks) a lieu le 14 pour Andolsheim où une maison est
louée à un certain Schillig pour un loyer mensuel
modique
de 15 Marks. Lorsqu’en octobre de la même
année Jean
Obrecht retourne à Andolsheim, il indique qu’il
dort dans
«notre maison» et qu’il prend seulement
ses repas
chez les Zitzer.
Les visites régulières à Andolsheim
continueront par la suite et il est arrivé que la petite
Hansi,
en véritable "Gänseliesl",
y garde les
oies, sans toutefois revêtir son costume alsacien qui servira
plus tard de déguisement à ses filles et
petites-filles.
C’est dans le berceau de la famille encore que Jeanne,
restée seule à Mulhouse après le
départ de
sa fille pour
l’ «intérieur» et le
décès de son père, ira se
réfugier à
la fin de la guerre 39-45, craignant les bombardements de la ville. En
fait, ce fut une décision erronée puisque
Mulhouse fut
libérée dès le 21 novembre 1944,
tandis
qu’Andolsheim se retrouvait dans la «poche de
Colmar»
où les Allemands opposèrent une
résistance
farouche en décembre 1944 et janvier 1945. Colmar ne fut
libéré que le 2 février. Pendant des
semaines le
village et les environs furent pilonnés par
l’artillerie
alliée, tandis que les habitants se terraient dans les
caves.
Avec le décès de son mari
l’existence de
Jeanne, et
indirectement celle de sa fille, âgée alors de 6 ans, change du tout au tout. Il
s’agit d’assurer les bases financières
de cette
nouvelle vie, tâche à laquelle la veuve
d’Alfred
s’attaque avec énergie. Elle commence par
réclamer
ce qui semble être un arriéré de solde
au 44e
régiment; elle écrit ensuite au
Ministère
de la Guerre
pour demander une avance de 400 Marks. Elle a en effet droit
à
une pension de veuve de guerre de la part de l’Empire
allemand,
pension qui continuera à être payée par
la
République française, selon la logique qui veut
que, si
son mari avait survécu, il aurait été
«réintégré de plein
droit» dans
la nationalité française. Le 31 octobre 1918 elle
postule
pour un emploi de secrétariat et écrit au
Ministère de l'Intérieur. Le 8 novembre deux
lettres
partiront encore pour les plus hautes instances régionales:
Colmar ("Präsidium") et Karlsruhe ("Verfassungsrat"). On ne
connaît pas la teneur de ces courriers, mais on doute qu'ils
aient été suivis d'effet dans la
débâcle
généralisée du Reich.